Spécialisée dans le traitement de déchets médicaux, l’entreprise AMB Ecosteryl, basée à Mons, a développé, en un temps record, un dispositif de décontamination de masques et blouses de protection. Une solution qui permet de les réutiliser plusieurs fois et de répondre ainsi aux importants besoins des hôpitaux et structures de soins.
Face à la pénurie de masques chirurgicaux et FFP2, le Gouvernement wallon a lancé une task force regroupant plusieurs cabinets ministériels, les bras financiers de la région (SRIW, SOGEPA, SOWALFIN) ainsi que plusieurs acteurs économiques et scientifiques majeurs du sud du pays avec un objectif: étudier la possibilité de produire et de décontaminer des masques utilisés.
Fort de son expertise dans le domaine du traitement des déchets médicaux, AMB Ecosteryl a, dès le mois de mars, lancé des essais afin de mettre au point un procédé qui permettrait, non pas de détruire des masques, mais de les décontaminer. Les machines d’AMB Ecosteryl broient et traitent jusque 7 tonnes de déchets par jour, après les avoir décontaminés. Mais ces immenses machines (ainsi que la cuve de décontamination) qui traitent des déchets n’étaient pas adaptées pour cette solution sanitaire de réutilisation de masque.
“Au niveau de la conception de la machine, des solutions professionnelles existaient déjà et permettent d’obtenir la température désirée par chaleur sèche. Nos équipes ont sélectionné les meilleures technologies dont un partenaire pour la conception de la machine. Par contre, il fallait adapter ces systèmes à nos protocoles et aux résultats des nombreux tests et essais effectués jusqu’à ce jour. Il était, par exemple, nécessaire de programmer un cycle spécifique de décontamination pour que la température corresponde à nos critères en termes de durée et de diffusion de la chaleur”, explique Frédéric DE MEULEMEESTER, CTO d’AMB Ecosteryl. “D’un autre côté, poursuit Frédéric DE MEULEMEESTER, pour faciliter la décontamination de son masque ou de sa blouse, nous avons imaginé des boîtes nominatives (comme des boîtes à tartines) dans lesquelles le personnel pourrait poser ses masques utilisés, ces boîtes iraient directement dans la machine, sans être ouvertes, et le personnel pourrait récupérer ses masques décontaminés 2h00 plus tard ou, selon le shift, le lendemain. Avec la certitude que son ou ses masques personnels n’aient pas été manipulés ou touchés. La chaleur sèche peut, en effet, se diffuser de manière homogène à l’intérieur de la boîte. Cela évite aussi les multiples emballages plastiques qui auraient été nécessaires pour reprotéger le masque qui aurait été touché et décontaminé avec une autre solution”.
Aujourd’hui, la machine de décontamination est donc opérationnelle afin de venir prêter main forte notamment aux hôpitaux. Et c’est à quelques centaines de mètres du siège d’AMB que le premier exemplaire de M-Steryl sera installé, au CHU Ambroise Paré. Un hôpital qui, comme les autres en Belgique, a vu sa consommation de masques exploser ces dernières semaines. De 430 masques chirurgicaux et 10 masques FFP2 par jour en période normale, le CHU a consommé jusqu’à 2 000 masques chirurgicaux et 400 FFP2 par jour lors de la phase la plus aigüe de la crise en mars-avril.
Une consommation qui représente une charge financière particulièrement importante pour les hôpitaux. D’autant que les prix ont flambé durant la crise. “Le masque chirurgical qui était habituellement à 25 centimes ne se trouve plus à un tel tarif. Certains masques FFP2 (de bonne qualité) ont été achetés 7,15 euros pièce au pic de la crise, ils sont maintenant achetés 4,15 euros pièce”, explique Stéphane OLIVIER, Directeur du CHU Ambroise Paré. Et avec la machine d’AMB Ecosteryl vendue à 6 000 euros, l’investissement sera rapidement rentabilisé.
Autre avantage de cet équipement, il peut également traiter les blouses de protection. Matériel lui aussi particulièrement utilisé durant cette période de pandémie de COVID-19. “Les blouses représentent également un enjeu majeur en termes d’équipement de protection individuelle pour notre personnel. Au début de la crise, il a particulièrement été complexe de s’en procurer avec le degré de qualité nécessaire”, explique le directeur d’Ambroise Paré.
De la taille d’un gros lave-vaisselle, la machine peut contenir 35 petites boîtes de chacune 5 masques chirurgicaux par cycle, ce qui équivaut à 175 masques décontaminés par cycle. Un cycle complet (manutention, décontamination) dure 2h00. En partant de la possibilité de faire 12 cycles par jour, il est possible de décontaminer 2 100 masques chirurgicaux par jour. Les masques FFP2 étant plus gros, il est possible d’en traiter 120 (modèle KN95) par cycle et donc 1 440 par jour. Pour les modèles à coques, il est possible d’en décontaminer 864 par jour. Enfin, au niveau des blouses, il est possible d’en traiter 12 par cycle et donc 144 par jour sur une base de 12 cycles. Dernier atout: sa facilité d’utilisation. Une simple prise de courant suffit à l’alimenter et une seule personne est nécessaire à son fonctionnement.
Un concept de décontamination qui rejoint les préoccupations environnementales d’AMB Ecosteryl. Pas de déchets, pas de fumée toxique, pas d’eau contaminée. Et des protections individuelles vouées initialement à la destruction qui deviennent réutilisables. “Avec cette machine de décontamination de masques, nous espérons pouvoir aussi jouer en faveur de l’environnement et du recyclage et, grâce aux boîtes personnelles, ce sont aussi autant d’emballages plastiques de protection qui ne seront pas générés” explique Amélie MATTON, COO d’AMB.
Une fois installées au CHU Ambroise Paré, les équipes d’AMB Ecosteryl et du CHU collaboreront afin d’analyser les premiers retours des utilisateurs et, si nécessaire, adapter le processus.
Aurélien LAURENT