Les bières de Charleroi
Créée en 2016, la Brasserie du Pays noir est une nouvelle venue dans le paysage brassicole hainuyer. Issue de la passion d’un jeune brasseur carolo, elle propose une bière blonde et son homologue brune. Mais la brasserie développe également des bières éphémères ou des productions sur-mesure à la demande. Depuis quelques mois, une partie de la production est réalisée dans ses propres installations à Charleroi, à quelques mètres de la Sambre.
A l’instar des success stories de la Silicon Valley, la Brasserie du Pays noir est née dans le garage de son concepteur, Nicolas Renard. “Depuis 2007, à la fin de mes études (ingénieur industriel, spécialisation brassicole, NDLR), je réalisais de petites productions, des brassins de 20 litres et j’ai fait ça pendant plus ou moins 8-10 ans”, explique le brasseur aujourd’hui âgé de 33 ans.
Mais après cette période où la production était simplement un hobby, cet amoureux de la bière et surtout de sa conception a voulu franchir une nouvelle étape.
“En 2015, mon épouse et moi, nous nous sommes posé la question: est-il possible de faire grandir le projet sans être étouffés par toutes les contraintes liées à la production de bières? “. Durant
un an et demi, la production du jeune brasseur a pris de l’ampleur tout en restant relativement limitée. “Nous brassions des brassins de 70 litres deux fois par jour, le week-end“. Une quantité limitée qui a très vite rencontré un beau succès mais qui demandait déjà beaucoup de travail pour un couple qui menait en parallèle une carrière professionnelle, tout en fondant également une famille. Le brasseur était donc arrivé au moment du choix: se limiter à une production artisanale sans visée commerciale ou au contraire, en faire un véritable projet professionnel! Et c’est la deuxième option que Nicolas Renard a choisie. “Nous étions, mon épouse et moi, peu épanouis dans nos job respectifs et s’investir dans ce projet brassicole représentait un beau défi pour nous“. La Brasserie du Pays noir était née!
Sans hésiter, le brasseur a choisi de miser à fond sur l’identité carolo. Le nom de la brasserie et son visuel ne laissent planer aucun doute: Charleroi est au coeur du projet. L’étiquette évoque à la fois la place Charles II mais aussi le passé industriel de la ville. Et petite particularité, la contre-étiquette relate une anecdote liée à la cité. Exemple: qui était Joseph Tiroux, qui a donné son nom au plus célèbre boulevard carolo? “Aujourd’hui, nous recevons même des propositions d’anecdotes. C’est sympa et ça contribue à faire connaître nos bières“, explique le brasseur.
Restait à choisir la meilleure option pour la production. Un choix qui ne s’est réellement pas vraiment posé tant les investissements de départ sont difficilement envisageables pour un jeune brasseur sans capital à investir. “S’équiper entièrement représentait un investissement de plusieurs centaines de milliers d’euros, impossible pour nous évidemment. Nous avons donc choisi de sous-traiter notre production“. Depuis juillet 2016, date de lancement officielle de la Brasserie du Pays noir, la production est réalisée dans les installations dans la brasserie Belgo-Sapiens à Nivelles. Sort alors des cuves nivelloises, la Blonde du Pays noir, rejointe à l’automne 2017 par sa soeur brune, deux bières à haute fermentation titrant à 7 %.
Face au succès rencontré par ses deux bières, la brasserie a franchi un nouveau cap en mars de cette année en s’installant à Marcinelle, le long de la Sambre, dans ses propres installations. Sur place, Nicolas Renard peut laisser libre cours à sa créativité en réalisant des productions uniques, éphémères de 1 000 litres. “Toutes les six à huit semaines, nous proposons une nouvelle bière. Ca permet de se renouveler et de toujours susciter la curiosité car une bière peut avoir très vite du succès mais le phénomène peut aussi très rapidement s’inverser“, explique le brasseur. La Blonde, elle, est toujours brassée à Nivelles. “En 2017, nous avons vendu 450 hectolitres de blonde, ici, dans nos installations, nous avons actuellement une capacité de production de 500 hectolitres“. La brasserie de Marcinelle est donc pour l’instant consacrée aux productions éphémères et bientôt au brassage également de la brune. Des bières qui se retrouvent dans les rayons des supermarchés de la région de Charleroi mais aussi dans des établissements HORECA même si le brasseur l’avoue, il est particulièrement difficile d’y trouver sa place en dehors des circuits classiques sur lesquels les grandes brasseries ou de puissants intermédiaires ont la mainmise.
Mais la Brasserie du Pays noir, ce sont aussi des bières personnalisées. “Nous brassons ici des bières sur-mesure, des bières à façon, développées exclusivement pour un client. Ce sont des produits où il y a une réelle demande. La recette est élaborée avec le client et elle lui est réservée“. Une production individualisée qui débute à partir de 450 litres. La brasserie développe aussi des recettes partagées pour des personnes à la recherche d’une bière exclusive mais qui n’ont pas besoin d’un volume de minimum 450 litres. Dans cette formule, le “droit d’entrée” n’est plus que de 50 litres. Une proposition qui rencontre beaucoup de succès notamment dans le cadre de fêtes familiales, mariages, baptêmes, etc. A terme, Nicolas Renard envisage aussi de proposer des ateliers de création de bière où en l’espace d’une journée ou d’une demi-journée, les participants pourraient réaliser leur propre bière à partir des ingrédients de base, le tout encadré par le brasseur. Une manière aussi pour lui de partager sa passion.
Aujourd’hui, la brasserie est donc en plein développement et vise un objectif de rentabilité dans moins de deux ans. Outre le brasseur, l’équipe est constituée d’un commercial à plein temps et sera bientôt renforcée tant au niveau de la production que de la gestion administrative, assurée pour l’instant par le brasseur et son épouse. Avec un fil rouge et un moteur principal: la passion. Pas question pour eux de développer une brasserie géante et de viser des volumes de production énormes. L’objectif est clairement de porter un projet viable à visage humain où l’équipe pourra trouver un juste équilibre entre vie professionnelle et vie privée, le tout bien ancré sur ses terres carolos.
Aurélien LAURENT