Fondée en 1842, l’entreprise Lebailly exploite deux carrières d’argile à Hautrage et produit une large gamme de produits. Au coeur de son activité, se trouvent les briques réfractaires. Un secteur dans lequel elle a développé une expertise dont la réputation dépasse largement les frontières belges. Et, depuis quelques années, la sa Lebailly a lancé une nouvelle série de produits: “Les Terres d’Hautrage”.
“Nous avions la matière première: l’argile, les outils de production et un marché qui se crée”. Pour Pierre FLAMENT, Responsable des Terres d’Hautrage au sein de Lebailly, l’entreprise installée à Tertre avait toutes les cartes en main pour développer cette nouvelle gamme de produits. Une production qui s’articule aujourd’hui en deux grandes catégories: les briques de terres crues et les enduits. Des matériaux qui, outre le fait que leur méthode de fabrication génère nettement moins de CO que des produits traditionnels, offrent des caractéristiques particulièrement intéressantes pour le secteur de l’éco-construction.
Première propriété des briques de terres crues pressées au sein de Lebailly: leur inertie thermique. “Les briques de terres crues permettent de stabiliser la température dans un bâtiment qui est correctement isolé”, indique Pierre FLAMENT. Un atout notamment pour les constructions passives. Les briques permettent donc de réguler naturellement la température au sein d’un bâtiment en relâchant progressivement de la chaleur emmagasinée, par exemple, par un mur dressé face à une baie orientée au sud. Et, contrairement à ce qu’on pourrait croire, les briques en terre crue sont adaptées à plusieurs usages, y compris la construction de murs porteurs.
En dehors de la construction, les briques en terres crues trouvent également un débouché dans les poêles de masse qui sont un système de chauffage au bois. “Historiquement, ils sont particulièrement répandus dans les pays de l’Est et les pays nordiques. Concrètement, on effectue une flambée vive et courte avec du bois sec de qualité et la maçonnerie de poêle va absorber la chaleur de cette flambée et la restituer progressivement”, explique Pierre FLAMENT. Dans les poêles de masse, Lebailly fournit les briques réfractaires pour la maçonnerie intérieure et les briques de terre crue pour une deuxième enveloppe. Des poêles qui dépassent régulièrement une tonne. Des installations de chauffage qui, par leur encombrement, doivent être intégrées dès la conception d’un bâtiment ou lors d’une rénovation importante.
En parallèle des briques, la gamme Terres d’Hautrage compte également des enduits d’argile parmi ses produits, un secteur qui représente la part la plus importante des Terres d’Hautrage.
Des enduits prévus pour être appliqués comme couche de base et/ou de finition intérieure. Et comme pour les briques, ce sont les propriétés thermiques des enduits qui sont mises en avant. “L’avantage le plus important des matériaux à base d’argile est qu’ils sont “intelligents”, c’est-à-dire qu’ils vont réguler l’humidité de l’atmosphère d’une pièce”, explique Pierre FLAMENT. “Là où de l’enduit est appliqué, il n’y pas de condensation sur les murs. L’argile va absorber l’eau et à l’inverse, s’il fait trop sec, l’argile va diffuser de la vapeur d’eau pour humidifier l’air. La sensation de confort est également renforcée. Ainsi, on peut chauffer légèrement moins une pièce dont les murs ont été enduits avec, à la clef, des économies d’énergie qui peuvent être importantes”. Afin de rencontrer un maximum de besoins, les enduits se divisent en trois catégories: les enduits de base, l’enduit torchis et les enduits “trad”. Des enduits qui peuvent donc
être appliqués sur quasiment toutes les surfaces.
Les produits des Terres d’Hautrage permettent donc de multiples débouchés et, plus particulièrement, dans le secteur de l’éco-construction. Mais malgré des indéniables qualités, les briques et enduits qui sortent des ateliers de Lebailly peinent à trouver des clients. Du moins de manière importante. “Le marché de la construction évolue très lentement, déplore Pierre FLAMENT. Il est difficile de faire évoluer les habitudes des architectes ou des professionnels du secteur. Aujourd’hui, les écoles d’architecture sont plus ouvertes et les étudiants sont beaucoup plus demandeurs et plus réceptifs par rapport aux nouvelles techniques. Mais il faudra encore attendre un certain temps pour profiter des retombées de cette évolution des mentalités”.
Deuxième obstacle identifié par Pierre FLAMENT: l’absence de base réglementaire ou de certification pour ces nouveaux matériaux. Un flou qui n’encourage pas les professionnels à franchir le pas et à utiliser ces techniques pourtant plus performantes à bien des niveaux que d’autres, plus traditionnelles. Néanmoins, les choses évoluent positivement et Les Terres d’Hautrage, comme d’autres acteurs de l’éco-construction, misent beaucoup sur l’inscription de ces nouveaux matériaux dans le cahier des charges type du service public à l’horizon 2022. Une reconnaissance qui pourrait doper le recours à ces produits novateurs. “Il y a beaucoup d’initiatives qui se mettent en place mais il faut du temps pour qu’elles portent leurs fruits”, analyse Pierre FLAMENT.
Aurélien LAURENT